« It was so good but now it feels so wrong! »
[FLASHBACK]La musique était pile poil au bon volume ce soir, juste assez pour couvrir mes pensées, mais pas trop bruyante pour m'empêcher de suivre une conversation. Un vendredi soir dans un bar, une bande d'amis, des rires, de l'alcool, un peu de danse, de la drague… Plus cliché tu meurs! J'avais besoin de m'amuser, de chasser mes idées noires et pour cela j'avais choisi de passer du temps hors de chez moi, de profiter de la vie de la même manière que mes congénères encore célibataires. A trente ans il existe bien des femmes mariées et mères de famille depuis des années déjà, moi j'en suis encore au stade "relations instables et sorties en boite les weekends". Pourtant, je n'en avais pas honte, je n'éprouvais ni remords, ni regrets… Je ne me sentais pas en retard, ni en marge de la société, je n'étais pas la seule dans cette situation et de toute façon ce n'était pas comme si j'allais prendre le premier venu, me marier avec et lui faire quelques enfants dans la foulée histoire de dire que je ne suis pas en retard dans l'évolution de ma vie! Chacun avance à son rythme, inutile de vouloir presser les choses. Trente ans ce n'est pas si vieux, en plus c'est tout récent… Alors voilà, j'étais dans ce bar remplis de jeunes très jeunes et de jeunes un peu vieux, tout le monde avait l'air de passer une bonne soirée, de mon côté aussi tout allait bien à l'exception peut-être d'une envie pressante. Je demandais donc à une amie de m'accompagner aux toilettes parce que oui, on est comme cela nous les filles, on aime aller aux toilettes à plusieurs, de cette façon même quand on fait notre petite affaire on ne s'ennuie pas, on peut continuer notre conversation. Après s'être rafraichies un peu, on décidait finalement de sortir, mon amie rejoignit notre table et alors que je la suivais je remarquais un jeune homme plutôt mignon en train de m'observer du coin de l'oeil. Assis au bar, lorsque je le vis avec son verre à la main je m'arrêtais là où j'étais et je le fixais, les sourcils froncés. Il me faisait penser au soir où j'avais rencontré Dimitri. A la place de ce type, je revoyais l'homme de ma vie le soir de mes vingt et un ans. Le visage de Dimitri remplaçait celui du jeune homme. Quelqu'un vint me demander si ça allait, j'hochais la tête pour leur faire plaisir, je me laissais tirer par la main, de retour à notre table. Soudain, j'avais chaud, ma respiration se fit rapide et difficile, j'étouffais. J'attrapais ma veste et lâchais à l'intention de mes amis "Je vais fumer" Je partis rapidement ne laissant le temps à personne de me retenir ou même de m'accompagner. Je réussis à tracer mon chemin vers la sortie du bar, devant il y avait presque autant de monde qu'à l'intérieur. Je sortis une cigarette du paquet que j'avais dans l'une de mes poches et la portais à ma bouche. Je cherchais ensuite mon briquet, en vain. J'avais dû le laisser à l'intérieur ou peut-être que je n'en avais pas. De toute façon je ne fume pas, enfin pas de manière régulière. La cigarette coincée entre mes lèvres, je m'apprêtais à la ranger quand une main apparue devant moi, quelqu'un tenait un briquet. "Merci" Je me tournais un peu pour voir qui avait eu la galanterie de me venir en aide. Alors que j'inhalais ma première taffe je vis le garçon du bar se tenir à côté de moi. Il semblait plus vieux vu à la lumière des réverbères, il était mignon, pas autant que Dimitri mais quand même. Je le fixais de mes grands yeux marrons-verts tout en laissant échapper de la fumée de ma bouche. Je pris ma cigarette dans mes doigts et fis tomber quelques cendres. "Tu m'as suivi?" On ne se connaissait pas mais je me permettais de le tutoyer quand même, ce n'est pas comme si nous allions faire des manières alors que nous nous trouvions devant un bar branché et que dans son regard tout ce que je pouvais lire c'était une envie irrésistible de me mettre dans son lit. Je n'avais qu'à le regarder pour savoir que j'étais sa proie, sa cible pour ce soir, restait encore à savoir si j'allais être touchée par sa flèche ou pas. Alors que je tirais une nouvelle gaffe sur ma cigarette, je regardais ma montre. Il était déjà trois heures du matin passées. J'allais devoir me décider rapidement parce que de toute évidence si nous voulions avoir le temps de faire quoi que ce soit avant le levé du jour, il allait falloir y aller. Je continuais de tirer longuement sur mon mégot avant de le lâcher et de l'écraser du bout de mon escarpin. "Dis-moi quelque chose de drôle." Fille qui rit, à moitiée dans ton lit. C'était vrai pour moi. Un garçon capable de me faire rire est un garçon chanceux. Dimitri était le meilleur à ce jeu là, il me faisait rire aux éclats jusqu'à ce que j'en ai mal au ventre. Je trouvais les hommes drôles incroyablement sexy et je ne résistais jamais bien longtemps à leurs charmes. Cela dit, je ne voulais pas de blagues lourdingues, je préférais les anecdotes personnelles, les citations de films, les critiques intelligentes de quelque chose en particulier, je voulais d'un garçon intelligemment drôle. S'il arrivait à me faire rire, j'étais prête à le suivre. Je haussais un sourcil en attendant qu'il m'en sorte une bonne. Dans ma tête je suppliais pour qu'il ne me déçoive pas.[FIN FLASHBACK]
La journée avait mal commencée, il y avait d'abord eu cette fille à qui j'avais dû parler durant un heure pour lui prouver que non, sa vie n'était pas finie sous prétexte que son chanteur préféré avait annoncé son homosexualité, j'avais tentée de ne pas lever les yeux au ciel mais cette séance avait été un véritable supplice. Elle avait été succédée par un jeune homme que je suivais depuis quelques mois déjà et dont les troubles du comportements ne semblaient pas aller en s'arrangeant. Il avait pris la mauvaise habitude de manger ses cheveux et durant toute la séance j'avais passé mon temps à lui dire d'arrêter ou encore de recracher. Le cas suivant atteignit l'apothéose lorsque ma patiente se mit à hurler que de toute façon je ne lui étais d'aucune aide et que je serais bien heureuse de la voir crever tout comme le reste de l'université. Je m'étais rarement sentie aussi peu douée dans mon métier, mais j'essayais de relativiser tant bien que mal en me convaincant que j'étais malgré tout une bonne personne en dehors du boulot et que cela pouvait encore sauver les meubles. La pause déjeuner passée, j'avais repris les rendez-vous de l'après midi. La première qui passa semblait annoncer un après midi plus calme que ma matinée, elle passa son heure de thérapie à pleurer mais au moins elle ne semblait pas totalement folle comme ses prédécesseurs. Cela dit, je compris rapidement qu'elle était tout aussi frappée lorsqu'elle se mit à uriner sur mon nouveau tapis. J'avais fait venir l'infirmière pour me débarrasser d'elle, priant pour qu'elle passe aux toilettes avant notre prochaine séance. J'avais l'impression de vivre un cauchemars dans lequel je campais le rôle de la pire psychologue. Dans mon métier je peux vous jurer qu'on en voit défiler des cas, mais ceux-là avaient atteints le summum et j'y avais eu le droit en moins de vingt quatre heures. Ma dernière séance de la journée me redonnait un peu espoir, il s'agissait d'un nouveau patient que je n'avais pas encore pu rencontrer. Il avait pris rendez-vous de lui même et je ne savais encore rien à son sujet. Des femmes de ménage avaient été envoyées pour nettoyer le sol et emmener mon nouveau tapis hors de mon bureau, j'en profitais pour aller boire un café et discuter avec quelques profs et quand l'heure de retourner travailler arriva, je repris la direction du centre médical du campus. J'aimais sortir du chalet de temps en temps histoire de voir du monde autre que mes patients ou mon assistante. Lorsque que j'arrivais à la porte d'entrée je vis un jeune homme assis, il était de dos et je ne voyais donc pas son visage mais son allure me sembla instantanément familière. Je fis mon entrée dans le petit hall. "Emrys Dashwood?" Je m'approchais, prête à lui serrer la main et à l'inviter à entrer dans la pièce où je fais les consultations mais lorsqu'il se tourna pour me faire face je poussais un petit cri d'effroi. "Toi?! Mais… Je … Qu'est-ce que… Qu'est-ce que tu fou ici?" Je n'étais pas du genre grossière d'habitude mais là j'étais carrément sous le choc. Comment m'avait-il retrouvé? Et que croyait-il faire en venant ici, sur mon lieu de travail? Il avait plutôt intérêt à déguerpir et vite, Emrys Dashwood n'allait sans doute pas tarder et je ne voulais pas que cet étudiant et ce type se rencontrent. Mêler vie privée et vie professionnelle ne menait jamais à quoi que ce soit de bon, et il était hors de question que je change d'avis là dessus.