La détermination dont elle faisait preuve n'avait rien à voir avec son impulsivité habituelle. Sur un coup de tête, pour un besoin. Là non. Rien n'était calculé, tout se faisait à l'instinct et surtout à cette envie dévorante de le rendre dingue, de le marquer, dans absolument tous les sens. Marquer sa peau de son passage, marquer son esprit par des souvenirs impérissables. C'était idiot. Elle avait toujours eu cette envie de marquer ses amants par ses performances, mais pendant cette nuit suspendue dans le temps, elle avait envie de le marquer autrement. Jane ne saurait l'expliquer, mais elle avait envie qu'il se souvienne d'elle comme d'une femme à chérir, à aimer le temps d'une nuit et non pas comme un jouet avec lequel on se satisfait un instant pour mieux s'en souvenir comme d'un fantasme. Non, elle ne voulait pas être un fantasme, elle voulait être plus que ça pour une fois. Elle voulait partager, ressentir, aimer peut-être un peu. S'éprendre de lui un instant, un moment, croire en une chose qu'elle ressent sans que cela ne soit réel. Croire quelques secondes, quelques minutes, qu'il l'aime ne serait-ce qu'un peu, qu'il la respecte assez pour lui faire l'amour et non pas la baiser bêtement. C'était cela ce qu'elle voulait, faire l'amour pour une fois. Avoir du plaisir dans l'intention de l'autre et non pas dans les sensations physiques. Et Dieu sait qu'il arrivait aisément à lui faire ressentir ses intentions. Cette façon de l'embrasser, de la toucher, elle ressentait très bien son intention de la combler avant de se combler lui-même. Et c'était plaisant, d'autant plus qu'ils étaient sur la même longueur d'ondes. Elle ne cherchait pas son propre plaisir mais bel et bien celui de Jesse, de celui qu'elle voyait plus comme un partenaire, un compagnon plutôt qu'un amant, qu'un adversaire à combler en premier. Ils se cherchaient l'un l'autre, se trouvaient parfois, se comblaient souvent.
Alors elle lui faisait confiance, c'était peut-être complétement fou mais elle s'en fichait, l'autorisant ainsi à faire d'elle ce qu'il voulait. Lui laisser le choix, ne pas s'imposer et au contraire, s'effacer pour une fois. Prendre des risques, prendre un risque. Celui de laisser Adélaïde prendre le dessus, dévoiler son âme un instant, un court moment. Se laisser aller, ne plus penser à rien, prendre le risque d'être vulnérable, au moins une fois. Alors elle le laissait faire, sans aucune résistance, son corps frémissant en entrant en contact avec la pelouse. Il la dominait de toute sa hauteur, de toute sa splendeur, de toute sa carrure et surtout de toutes ses envies. Le contact de ses lèvres sur sa peau, sur sa poitrine lui donnait la chaire de poule, des frissons sublimant sa peau à la lumière de l'astre qui les surveillait. Un soupire discret mais profond vint alors accompagner ses doigts qui entraient en elle, une nouvelle fois. Plus sûr de lui, plus déterminé encore que dans la piscine. Adélaïde avait fini par fermer les yeux, se concentrant sur cette descente vertigineuse du brun tandis qu'elle retenait en vain des gémissements naissants, engendrés par cette impatience qui enflammait ses reins. Il jouait avec elle, jouait avec ses envies et enfin la délivrance tandis que ses lèvres et sa langue entraient en contact avec sa féminité. Il gagnait la partie aisément avec ce geste, faisant d'Adélaïde une proie facile au plaisir. Les doigts de la jeune femme glissaient alors dans ses cheveux ébènes tandis que l'autre aggripait parfois son bras entourant sa cuisse ou bien l'herbe effleurant sa peau. Son dos se courbait parfois et son ventre se creusait à chaque gémissement, de moins en moins discrets. Il l'enflammait, la dévorait, l'emmenait sur le chemin de celui que tout le monde cherche dans ce genre de moment. Si l'eau avait été capable de la refroidir jusque là, la chaleur qu'il engendrait rendait vite sa peau chaude et moite. Un soupire presque de soulagement passait alors le seuil de ses lèvres lorsqu'il lâchait prise, lui laissant un court temps de répit.
Retrouvant ses lèvres avec une envie non dissimulée, elle glissait sa main dans sa nuque, narguant sa langue, accrochant parfois sa lèvre inférieure avec ses dents. Gémissant contre ses lèvres à leur union, elle captait son regard difficilement. Non pas qu'elle avait du mal à le soutenir, au contraire, mais le plaisir l'envahissait tellement qu'elle peinait à garder les yeux ouverts pour le regarder, pour le dévorer tout entier des yeux. Ses mains remontaient alors le long de son cou, rejoignant son visage qu'elle caressait de ses pouces tandis que les mots de Jesse résonnaient à ses oreilles. C'était la seconde fois qu'il s'exprimait de cette façon et la seconde fois qu'elle ne savait pas quoi lui répondre, se sentant profondément ridicule. Peut-être qu'elle prenait trop les choses à coeur mais tant pis, c'était trop plaisant pour ne pas y prendre une certaine satisfaction, trop gentil en même temps pour être ignoré. Ne le lâchant pas du regard, le temps semblait être suspendu, quelques secondes. Elle souhaitait au plus profond d'elle qu'il comprenne que si elle ne répondait rien c'était parce qu'elle n'avait pas l'habitude de ce genre de choses et que, par conséquent, il existait chez elle une sorte de rejet, de pudeur, vis-à-vis des compliments sincères. Elle espérait que le regard qu'elle portait sur lui suffirait à lui faire comprendre qu'elle le remerciait et qu'elle trouvait ses dires réciproques. Parce qu'il était divin lui aussi, presque trop parfait pour être réel si on en oubliait son penchant pour l'alcool. Glissant ses bras autour de son cou, elle le rapprochait alors d'elle, déposant un baiser doux le long de sa mâchoire puis sur ses lèvres, enclin à lui faire comprendre ce qu'elle ressentait à cet instant, comme un soutien au regard qu'elle lui avait accordé. Pendant un court instant, elle s'était mise à frémir sous ses caresses, remontant sa cuisse contre lui, entrainée par sa main aussi douce que puissante.
Leurs lèvres se frôlaient, leurs souffles se mélangeaient et le plaisir recommençait à monter de nouveau. Les mains d'Adélaïde glissaient sur le dos humide de son compagnon, s'y aggrippaient parfois. Il l'allait la tuer à ce rythme-là. Elle s'était vite remise à gémir contre ses lèvres, laissant parfois son souffle s'écraser contre la peau de son cou. Tout était à même de la faire chavirer. Son parfum, leurs bassins claquant l'un contre l'autre dans une mélodie des plus agréables, les baisers qu'ils s'échangeaient lorsqu'ils le pouvaient. Elle était faite, elle était coincée et devait se rendre. Quelques secondes, peut-être minutes en plus et voilà qu'elle lâchait les armes, exprimant tout son plaisir aux oreilles de Jesse. C'était mieux que l'argent, mieux qu'un voyage en montgolfière, mieux que le shit, mieux que l'alcool, mieux que la muraille de Chine, mieux que tout, mieux que la vie. Sa maitrise du corps et du plaisir féminin avait eu raison d'elle. Il l'avait amenée jusqu'à l'orgasme, épuisant ses ressources en matière de retenue. Elle se fichait bien que les voisins de la piscine puissent l'entendre. A cet instant, ils n'y avaient qu'eux, que lui et cette sensation de plénitude. Son corps tout entier s'était contracté sous le plaisir et voilà que la pression redescendait et que son corps retrouvait la terre ferme. Malgré son souffle court et saccadé, elle ne pouvait s'empêcher de déposer des baisers dans le cou de Jesse, remontant lentement mais sûrement à ses lèvres qu'elle goûtait avec délectation et douceur. Elle n'avait pas pour habitude d'être si douce. La Jane habituelle aurait même eu tendance à se vanter pour jouer la fille qui s'en fiche, qui se rhabille et s'en va.
Mais ce soir, ce n'était pas le cas, elle n'était pas Jane. Adélaïde avait besoin de ce moment de douceur, un instant normal pour la plupart des personnes après l'amour. Elle avait même remonté ses jambes contre le jeune homme pour l'entourer, le caressant avec ces dernières et l'empêchant par la même occasion de sortir d'elle. Ce contact chaud, elle voulait le garder encore un peu, égoïstement probablement. Après quelques baisers, elle avait fini par lui mordiller la lèvre avant de lui décrocher un sourire et enfin d'ouvrir la bouche pour exprimer quelques mots dans un murmure qui lui traversait l'esprit et qui, par conséquent, se trouvait être aussi spontané que sincère. « Restes avec moi. » T'en vas pas, ne fait pas comme les autres abrutis avant toi. Ne fait pas comme moi. C'est ce qu'elle se disait, ce qu'elle souhaitait. Qu'il ne fasse pas l'idiot, se rhabille et s'en va comme elle aurait pu le faire si elle n'avait pas laissé Adélaïde s'exprimer. Elle savait d'avance qu'elle en serait blessée malgré elle. Elle voulait juste qu'il reste. Pas besoin de parler ou de faire semblant de s'aimer ou quoi que ce soit d'autre. Sa présence lui suffirait, la rassurait probablement. L'instant vulnérable il était là. Elle était Adélaïde et elle voulait plaire autant que si elle était Jane, mais d'une façon différente. Si Jesse restait, inconsciemment ça serait une victoire pour Adélaïde, c'est qu'elle lui plaisait assez naturellement pour qu'il passe encore un peu de temps avec elle. Si au contraire il s'en allait, Jane marquerait un point et la jeune femme ne laisserait probablement plus sortir sa véritable identité en compagnie d'un homme. La balle était dans le camps du brun et il se jouait ici un moment important pour l'Argentine bien qu'elle l'ignorait elle-même.
Elle savait qu'ils ne pourraient pas passer la nuit ici, ça serait trop risqué s'ils ne se réveillaient pas à temps au petit matin. Elle savait donc qu'il ne pourrait pas rester avec elle toute la nuit, qu'ils allaient finir par se quitter pour partir chacun de leur côté. Mais elle ne souhaitait pas que ce soit maintenant, alors elle lui proposait une ultime solution. « Je sais que ça va être difficile de rester ici pour la nuit et pas forcément très agréable pour le dos non plus. » Riant doucement elle préférait prendre ça à la légère plutôt qu'au sérieux. « Alors je te propose de finir la nuit chez moi ou ailleurs. » Elle lui laissait une option de sortie pour qu'il ne se sente pas coincé bien qu'elle lui avait promis plus tôt une longue nuit avec elle. Après tout, en général, c'est plutôt l'inverse et Jesse n'avait peut-être pas l'envie de finir chez une inconnue puisque après tout c'est ce qu'elle était. Quoi qu'il choisisse, de finir la nuit chez elle, dans un hôtel, dans la voiture d'Adélaïde ou chacun de leur côté, elle savait déjà qu'elle n'était pas prête d'oublier ce visage, ce regard, cet homme tout entier.
she feels safe in |