ST VALENTIN - Speed Dating - Brad et Miranda

Je suis parfaitement conscient du fait que ce soir je devrai passer la soirée avec Anna, qu’on ne s’y trompe pas. Ouais, mais genre vraiment conscient en plus de cela. Et pourtant, avec un petit sourire en coin je finis ma cigarette et retire l’anneau que je porte au doigt, écrase mon mégot pour la beauté du geste. Et entre dans le bar, lieu de rendez-vous officiel pour ce qui est d’adopter une personne sexuellement parlant. Je m’avance un peu dans la foule, me fait une place, écoute les instructions, prend un numéro et deux, non trois profil avec moi. Je repère assez rapidement la fille qui m’a été attribué pour mon premier tête à tête. Elle est belle, je ne peux pas le nier, alors d’un pas plutôt retenu je me précipite à sa table, oui parce que bon elle m’a été attribué mais faudrait pas que quelqu’un d’autre arrive devant elle et se fasse passer pour moi. Je me perds quelques secondes sur la feuille de son profil en même temps que je prends place. Ca me fait doucement sourire quand je lis la ligne de ses recherches, et finalement je relève le regard vers elle, j’affiche un visage sur de moi et un regard charmeur, ça malgré moi c’est vrai. Et comme un couillon je demande « Le Mexique ? » La destination de son fantasme, oui, oui, j’attaque par ça.

« Pardon ? » Merde je suis dégouté, ma question n’a pas fait l’effet que je souhaitais. Bien au contraire, elle me toise un peu du regard, semble vouloir définir si je peux être assez bien pour elle. Je la laisse faire, après tout ce soir on est ici pour cela, pour s’apprivoiser et faire semblant de craquer en quelques secondes. S’imaginer toute une vie alors qu’au final la plupart des gens qui sont présents ici ne gagneront qu’une nuit. « - Wallace, Bradley, tous les pays du monde ? Visiblement, ça nous fait une destination en commun. » Je souris grandement après sa phrase, content que même si elle ne sait pas comment aborder la chose elle ait pour elle un humour que j’aime bien. « Ouais, espérons qu’on y aille en même temps. » Au Mexique évidemment, je me sais sans gêne, mais tant pis, on n’a pas le temps de se gêner ici, quand on aura réellement commencé à parler, on va devoir tourner. « Je vous inviterai bien à vous assoir mais il me semble que c'est déjà fait. » Je hausse les épaules pour toutes explications, toutes excuses ou je ne sais quoi. « Oui, j’ai pris les devants, j’aime bien prendre les devants. » Elle va surement me prendre pour un fou, mais franchement, je ne m’imagine pas la revoir après ça, alors autant le faire à fond, pas vrai ? « Un homme un vrai, tu m’expliques ? » S’il te plait que je lui dis avec un sourire.

« - Tu t'avances un peu trop vite, là, tu ne crois pas ? » Je souris de toute mes dents, charmeur, un brin hautain aussi. Je ne sais pas si je m'avance vite, mais en tout cas une chose est certaine c'est que je m'avance, n'est ce pas ? Enfin, peu importe, d'un autre côté je me dis que si je ne vais pas au Mexique avec elle, sûrement que j'irai avec une autre. Et qu'on ne me propose pas de le faire avec Anna, ce soir, je l'ai oublié celle la. Oui c'est la Saint Valentin, et alors ? Je lui demande finalement ce qu'elle entend par « un homme » ce à quoi la demoiselle répond quelque chose qui me fait doucement rigoler. « - Je préfère que nous évitions ce sujet, je n'aurais pas envie de te faire complexer. » Je secoue le visage, préfère me taire finalement, non pas parce qu'elle me fait fermer ma bouche avec ses mots, non parce que je crois que si je lui démontre par a plus b que je pourrai la faire crier plus fort que tous les autres notre speed dating serait annulé. « Qu'est-ce qui t'amène ici, ce soir, toi ? » La question est plutôt bonne, faut l'avouer, beaucoup plus sérieuse que celles que moi j'ai posé. Je hoche le visage de gauche à droit quelques secondes, pas longtemps, il ne faut pas perdre de temps dans une situation comme la nôtre. « La curiosité ? » Je me demande plus à moi-même qu'à elle pour dire vrai, puis je me confirme seul aussi. « Ouais, la curiosité. La Saint Valentin, ce n'est pas mon truc, je crois même que j'en ai jamais passé une accompagné. Enfin, en couple quoi. » Oui, bon Anna, mais même en deux ans à ses côtés, je ne l'ai jamais passé avec elle cette soirée. « Et toi ? » Ce qui l'amène ici, et puis … « T'es venu chercher l'homme de ta vie ? » Une dose de sérieux, pour dix de débilité, je sais.

J’ai vraiment envie de savoir, mais je me dis qu’elle va surement faire comme moi, mentir du début à la fin quoi. En réalité, on est ici pour cela, pour vendre du rêve à l’autre, le faire espérer et plus si affinités. Sauf que je ne pense pas me tromper si j’avoue penser qu’ici entre nous deux des affinités il n’y en a pas tant que cela, bon pas grave, j’ai encore deux chances de trouver une fille qui voudra bien de moi comme jouet, ou plutôt qui acceptera le rôle de celle qui veut bien m’accompagner pour une bonne fin de soirée. Et alors que je pense que tout est fini elle rapproche sa main de la mienne et moi je fronce les sourcils sans comprendre, surtout lorsqu’elle m’offre sa phrase pleine d’un mystérieux bien dosé. Bon en un sens j’aimerai bien que la réponse à ma question soit non, parce qu’il me semble évidemment que je ne suis pas l’homme de sa vie, moi je me contente simplement d’une nuit, je ne suis pas compliqué et plus de cela je ne demande pas grand-chose en échange du bon temps que je pourrai lui faire passer. « Et sinon, c'est quoi ton genre ? » Directement mon esprit se focalise sur trois filles, c’est tellement étrange que ça me surprend réellement. La première Anna, évidemment, ma femme, blonde, douce, soumise, parfaite en tous points, je ne sais pas si c’est mon genre mais en tout cas c’est avec ce genre là que je suis marié. La seconde, Alice, tout son contraire, le genre de fille qui peut faire tourner la tête à n’importe quel gars sans vraiment le savoir, de celles qu’on a envie d’avoir à ses côtés même si l’univers entier semble s’y opposer. Et la dernière, Sapphire, étrange créature dotée d’un pouvoir d’attraction incontrôlé, qu’on ne peut pas s’empêcher de cajoler. Mon type de femme vraiment ? « Je ne saurai pas le définir. » Et mon type d’homme ? Encore moins, alors j’avoue que « Je fonctionne au feeling. Et le tien ? » Pas aux sentiments, hein, au feeling, s’il vous plait, ce sont deux choses différentes.

Je suis encore perturbé du fait que sa main soit sur la mienne, mais bon, je ne m’en plains pas pour autant, surement qu’elle a décidé de je ne sais pas, se dire qu’il ne reste pas beaucoup de temps alors que c’est à présent qu’il faut commencer à jouer. Je ne saurai le définir, mais lorsque je lui raconte que moi je fonctionne au feeling, elle me caresse lentement et parce que je suis trop homme et trop con surtout, je me permets d’apprécier. « - Je vois. » Synonyme de je m’en fous, mais tant pis. « Mon type à moi ?! » Et bien oui, vu que nous sommes au milieu de cette conversation-là. Autant qu’elle avoue elle aussi ce qui lui plait, ce qu’elle veut chez un homme et je crois les doigts pour que j’en fasse partie. Même si je suis réaliste, j’ai un espoir de fou, du coup, surement que je pourrai la laisser se prendre à son jeu, je pourrai lui plaire si elle voulait vraiment essayer. « Les hommes matures. » Soit. Je réponds à son sourire malicieux par un des miens. J’ai vingt-six ans, alors est ce que je suis assez mature ? J’en sais trop rien, si elle avait dit les hommes plus vieux, ça m’aurait arrangé, là, j’avoue que je ne sais pas trop quoi penser. Anna dirait que mature je suis loin de l’être, je ne me vois pas encore prêt à être enfermé dans un truc en réalité, bon d’accord je suis marié, mais je préfère me dire que ça ce n’est qu’un détail fait pour m’emmerder. « Alors donc … » Cette fois c’est à mon tour d’attraper sa main, je la prends dans la mienne en guettant sa réaction, quelque chose de surement un peu con. Elle veut jouer, et je vais lui prouver que je suis bien meilleur qu'elle à ce jeu là. « Peut-être que je pourrai te convenir. » Peut-être, oui, on ne sait jamais.

Lorsqu’elle retire rapidement sa main de la mienne, je comprends que je me suis fait avoir. Mais puisque je suis bon joueur, je me permets de lui lancer un regard rieur. Après tout on est ici pour ça, pour s’amuser de l’autre, avec l’autre, peu importe. On ne se prend pas au sérieux dans ses rendez-vous, et franchement, j’en suis bien heureux, parce que je n’ai jamais eu envie, ni même le courage en vérité, d’endosser la chemise du mec sérieux. « Ou pas. » Prononce la demoiselle et moi je hausse les épaules toujours sur de moi, ce mouvement lui signifie que de toutes les façons, si ce soir ce n’est pas elle, ça en sera une autre. Alors quand la cloche retenti pour me donner le signal du départ. Je me lève en lui offrant un sourire des plus grands. Je ne m’avoue pas vaincu, enfin pour la bataille contre elle, oui, je le suis clairement, mais pour les deux autres à venir, j’y crois encore à ma petite victoire personnelle. « Et bien à jamais ! » Je lui dis en guise d’au revoir en riant à moitié. Je replace ma chaise correctement à sa table, je ne lui souhaite pas de trouver l’amour de sa vie ce soir, je ne lui souhaite d’ailleurs rien, parce qu’il faut être réaliste, ce n’est pas parce que c’est la Saint Valentin qu’on va se mettre tous à s’aimer d’un coup. De une ce serait laid et de deux … Ouais, non, ce serait juste laid.