ST VALENTIN 2 - Speed Dating - Adam et Grace.

L’esprit encore un peu avec ce Paul qui vient de me quitter je ne réalise pas de suite le nouvel homme qui s’avance devant moi. Faut dire qu’il a réussi à me perturber, non pas troubler, ni même charmer, juste intriguer et perturber, je ne trouve juste rien d’autre à ajouter. Enfin dans un geste lent, je glisse la page du profil de Paul sous le bas de la pile pour me concentrer sur la nouvelle. Dans un premier temps, je retiens son prénom « Adam » et dans un second, je parcours rapidement les informations qui suivent. Son âge, trente-cinq ans fait un peu tilter mon esprit, l’écart entre nous est grand mais lorsque mon regard se relève pour croiser le sien, puissant, je me dis qu’après tout l’âge ne compte pas et qu’on ne sait jamais, cette soirée est de plus en plus prête à m’étonner. Alors je souris, pour tenter de l’accueillir. Pour me faire avenante ou une chose du genre quoi. Comme tout à l’heure, je me demande bien ce que je pourrai dire pour lancer la conversation, puis je réalise à quel point cela peut être bête de se prendre la tête pour cela. Autant se lancer, pour ne jamais rien avoir à regretter. « Bonsoir, je suis Grace et apparemment je suis ton second rendez-vous ce soir. » Bon je ne lui apprends surement rien, mais faut bien commencer par le commencement, non ? En tous cas c’est avec un sourire que j’ai dit ça et avec en pensée, qu’il est beau c’est vrai, et que surement qu’il mérite que je m’arrête un peu plus sur son profil, ce que de mes prunelles, je fais en attendant patiemment d’entendre sa voix pour la première fois.

Cette soirée imposée s’annonce finalement intéressante. Mais dix minutes, c’est bien trop court. Déjà, je dois abandonner Rose, mon élève surprenante ce soir pour une autre femme, qui je l’espère jouera un jeu tout aussi surprenant. Comme synchronisés, les hommes se lèvent et se dirigent vers leur nouvelle table. J’arrive devant une brunette aux yeux clairs, je ne sais pas pourquoi, j’ai toujours trouvé les brunes plus expressives, plus sulfureuses. Son sourire anime le mien et je l’écoute se présenter comme mon deuxième rendez-vous. Grace, un joli prénom, plus si répandu que ça aujourd’hui et pourtant, à ses traits je devine qu’elle est jeune, beaucoup plus jeune que moi. Une fois assis et pour répondre à sa phrase, je me penche légèrement vers elle comme pour lui confier un secret. «Je suis bien heureux que tu sois mon deuxième rendez-vous, j’ai cru que j’allais devoir m’arrêter à la table d’avant ». Je pointe discrètement d’un signe de tête la table juste à côté de la nôtre où se tient une femme, pas très gâtée par la nature qui n’a cessé de griffonner des cœurs sur le papier du premier individu qu’elle a rencontré. Je ris légèrement pour ne pas qu’elle me prenne trop au sérieux. « Moi c’est Adam enchanté Grace». J’aime son contact, elle, elle n’a pas l’air d’être une fille coincée. « J’espère que tu n’es pas tombée amoureuse du premier type que t’as rencontré … ça m’ennuierait vraiment ». Le sourire apparent, mes yeux scrutent son visage, c’est une boutade dans le seul but de détendre l’atmosphère. Ce genre de jeu, ce n’est pas vraiment mon truc et franchement, je serais beaucoup plus à l’aise dans un bar sans ces papiers et ces dix minutes.

Je le regarde s’assoir tout simplement, sans rajouter une nouvelle chose à mes précédentes phrases, je me fais patiente mais pas pour longtemps étant donné qu’il se rapproche un peu pour me confier ce qui pourrait paraitre comme un grand secret. Il me dit alors qu’il est content que ce soit moi, plutôt que la fille qui se trouve non loin de là, esquissant un sourire fin sur mes lèvres je détourne le regard du sien pour chercher de mes prunelles la dite fille et l’inspecter. Et puis je ris un peu, reflétant son propre rire que j’apprécie, quand je la vois griffonner je ne sais quoi sur une des feuilles descriptives d’un de ses rendez-vous. Je me trouve bien chanceuse de tomber sur lui en second rendez-vous, étant donné que je suis totalement réaliste quant au premier que je viens de vivre. On ne se reverra plus jamais, tant pis. Il se présente alors et je souris toujours, hoche le visage positivement pour lui démontrer que moi aussi, je suis enchantée. « J’espère que tu n’es pas tombée amoureuse du premier type que t’as rencontré … ça m’ennuierait vraiment » Je hausse les sourcils pour lui signifier qu’amoureuse moi, c’est bien loin d’arriver. Je suis hermétique à l’amour, un vrai cas social sur le sujet, je tiens tellement à ma liberté que jamais je ne me ferai avoir par une chose aussi futile qu’une amourette qui pourrait absolument gâcher tous mes projets. Je suis trop indépendante pour aimer. « Tomber amoureuse ? » Je demande en souriant, quelque chose de grand, non pas que je me moque de lui, mais je lui montre à quel point ça me semble étrange rien que d’y penser. « Ce n’est pas mon genre, réellement pas. » Je secoue le visage d’ailleurs pour accompagner ma phrase et puis dans un petit rire je lui avoue. « Et en plus, le premier type et moi ? Bon dieu c’était un désastre, je te promets. » Je passe une main dans mes cheveux avant de continuer « Et toi alors, tu as trouvé la femme de ta vie en la première que tu as vu ? » Je trouve étrange un peu, mais agréable, de lui parler, comme si on était déjà ami, c’est vrai.

Son attitude entière jure avec le thème de la soirée. Les speed dating ne sont-ils pas justement fait pour permettre aux âmes en quête d’amour de trouver leur moitié ? Malgré moi je ne peux m’empêcher de sourire à ses mots tranchants parce que j’aime cette attitude, j’aime ce détachement qui me surprend quand il vient d’une femme. « Ce n’est pas le genre de toutes les femmes de tomber amoureuse ? ». Je me fais plus provoquant. Je sais qu’elle va me détester pour mes mots, qu’elle va me prendre pour un macho. Mais c’est le but. J’ai envie de la poussée un peu plus encore dans ses idées. « Tu dis que ce n’est pas ce que tu recherches et pourtant tu es là … ». J’appuie un peu plus mes premières paroles. Bon, je fais partis moi aussi de la soirée parce que j’ai été contraint et forcé d’y être et je n’ai aucun doute non plus, sur la raison de la venue de la jeune femme. Mais ce jeu de provocation me plais alors je fais le naïf. Son premier rendez-vous s’est mal déroulé et je fronce les sourcils étonné. « Ah ? Tu m’as pourtant pas l’air d’être le genre de fille coincée et ennuyeuse … ». De prime abord ce n’est pas la sensation qu’elle m’avait donné, je ne mentais pas. « Il t’as fait des propositions bizarres ? ». L’air sérieux, je cherche des yeux le type qui occupait sa table, bien que je ne sache même pas à quoi il ressemble. « Si tu veux, je peux l’attraper à la sortie ». Toujours l’air sérieux, bien que je sois entrain de plaisanter. C’était totalement mon genre de provoquer des bagarres, mais ce soir, je serais sage ou presque. « La femme de ma vie ? ». Je ris à sa remarque. Tout comme elle, ces légendes ne font pas parties de mes croyances. « Mon premier rendez-vous s’est bien passé, mais je ne compte pas rentrer avec la femme de ma vie ce soir ». Doucement, je me laisse tomber dans le fond de mon siège. « J’espère que je ne passe pas pour un salaud ». Le sourire implacable. Au moins, je suis honnête.

Je souris un peu lorsqu’il me demande si ce n’est pas le genre de toutes les femmes de tomber amoureuse. Malicieusement je le regarde en passant ma langue sur mes lèvres tout en sachant très bien ce que je vais répondre à son « affront » et puis en un sens j’espère aussi qu’il s’attend à ce que je le dise. « Je ne suis pas toutes les femmes. » Je hausse les épaules en riant à moitié derrière ma lèvre inférieure que je suis en train de mordiller. Il relève le fait que je suis ici malgré tout, et j’avoue qu’il marque un bon point. Je ne veux pas passer pour une fille facile alors ce coup-ci je me retiens de lui dire que je suis ici pour espérer passer une bonne nuit. De toute façon je ne lui répondrai cela que par pure provocation, je n’ai aucune idée de ce que je viens chercher, juste une bonne façon de m’amuser. De patienter le temps que cette fichue Saint Valentin soit terminée. J’aime comme il me voit comme quelqu’un qui n’est pas coincé, quelqu’un qui ne se prend pas la tête, ouais, c’est ce que je suis et que je me revendique d’être. Alors pourquoi ça n’a pas marché avec Paul ? « Il t’as fait des propositions bizarres ? » Cette fois je ris clairement, amusée par ses idées et son détachement, ses mots tellement détendues. J’ai l’impression d’être en train de vivre une soirée totalement différente de celle qui a commencé. Et quand il me propose de l’attraper à la sortie mon rire redouble d’intensité. Cependant je hoche le visage négativement en ajoutant « Ca ira, je crois juste qu’il ne savait pas ce qu’il faisait ici. » Tortillant un peu mes doigts entre eux je l’écoute m’expliquer qu’il ne compte pas trouver la femme de sa vie ce soir, et d’un côté je suis bien contente de le savoir. « J’espère que je ne passe pas pour un salaud » Finalement je passe ma main dans mes cheveux, les accroches un peu, et le jauge du regard, faisant exprès, c’est vrai. Avant de me décider à lui exposer ce que j’ai en tête. « Un salaud, non, j’en ai pas l’impression, tu me sembles juste sans prise de tête, et j’avoue que ça me plait. Et puis si toi tu passes pour un salaud, je suis une fille facile parce que je ne cherche pas à me caser d’après toi ? » Ca m’intéresse, le point de vue qu’il peut avoir sur moi, je ne mentirai pas.

Elle n’est pas toutes les femmes, et sans même qu’elle ne me fasse la remarque, j’en suis intimement convaincu. Appelez ça comme vous voudrez, l’instinct ou le feeling … Mais je me sens simplement à l’aise avec elle, un sentiment qui s’accroît au fil de ses réactions, de ses réponses, des ses rires, de sa façon de se mordiller les lèvres et de capter mon attention dessus sans même le vouloir. C’est une séductrice, une chasseuse, ce jeu ne me trompe pas, je sais exactement ce qu’elle est, et elle est très loin de la fille facile que l’on charme vaguement dans un bar et qu’on se fait dans les toilettes. Non, elle, elle choisit l’homme avec qui elle rentrera, elle peu abuser de naïveté dans le seul but de tromper, mais elle est loin de l’être et je le sens, je le perçois. Surtout quand son regard jugeant se pose sur moi à ma question, me déstabilisant l’espace de quelques secondes, m’obligeant à feindre un air penaud avant de retrouver mon sourire à ses mots. « Je pense que tu m’as cerné, je suis surpris ! ». Et je le pense sincèrement. C’est agréable d’être vu à travers les yeux d’une femme de cette façon, sans prise de tête, sans chichis, sans complications. Mon dieu ce que les femmes peuvent être compliquées parfois. « Une fille facile ? ». Je ris légèrement tout en me rendant compte que sa question est sérieuse, qu’elle est justement cette fille qui ne cherche pas à se caser. « Je ne dirais pas que tu es une fille facile, je dirais que tu es une fille difficile … ». J’étire les lèvres, dans le fond de mon siège. Puis je relève mon regard vers le sien, le plantant dans ses yeux clairs. « Je pense que tu sais ce que tu veux et ce que tu ne veux pas, que tu diriges, que tu as besoin de contrôler ». Puis dans un souffle tendu je jette : « Je pense que tu as peur aussi ». C’est peut-être trop, on ne se connaît pas et je me fais déjà un avis sur elle, un avis que je lui donne sans même qu’elle me l’est réellement demandé. Mais voilà, c’est fait et je n’ai plus qu’à guetter sa réaction.

Alors je lui sors mon semblant de discours sur celui qu’il est et sur celle que je suis peut-être. Je crois en chacun de mes mots le concernant, je ne pense en aucun cas qu’il n’est pas quelqu’un de bien, qu’il passe son temps à briser des cœurs et à les laisser trainer sur son chemin. Oui, je pense qu’il en est bien loin. « Je pense que tu m’as cerné, je suis surpris ! » J’affiche un sourire, pour le coup, plutôt fière de moi, comme je le suis bien souvent, n’est-ce pas ? Je me demande pourquoi il se dit surpris, après tout, je ne crois pas être la seule à avoir ce raisonnement, à penser que tous les hommes ne sont pas des salauds parce qu’ils veulent simplement s’amuser. « Une fille facile ? » Il revient sur ce point, m’offrant un rire en première réponse. Intriguée, j’attends patiemment qu’il continue le fil de ses pensées. « Je ne dirais pas que tu es une fille facile, je dirais que tu es une fille difficile … » A mon tour de rire cette fois, d’avoir l’impression qu’il me cerne facilement lui aussi. Je mords ma lèvre inférieure et garde mon sourire en coin, je crois que j’aime bien la façon dont il me voit, mais je le garde encore pour moi. « Je pense que tu sais ce que tu veux et ce que tu ne veux pas, que tu diriges, que tu as besoin de contrôler » J’incline le visage, je me demande s’il déduit cela de ma fiche et des idioties que j’ai noté à l’intérieur ou bien de mon attitude, de ce que je dégage ou je ne sais quoi. « Je pense que tu as peur aussi » Ce coup ci je fronce les sourcils, sans comprendre, ou plutôt en comprenant trop, mais dans tous les cas ça ne me plait pas. Enfin je sais pas, mais comme je n’ai pas envie de me prendre la tête et que malgré tout, j’aime le gout de ses mots, je pose mon visage entre mes deux mains, sur mes bras posés sur la table et avec un petit air de défi je lui dis « Et d’après toi, j’ai peur de quoi, Adam ? » De la vie ? De l’amour ? De ne plus avoir le contrôle sur mes idées ? Je n’en sais rien, je n’ai jamais su surement, mais j’ai envie de l’entendre, ça j’en suis persuadée. Puis je deviens allumeuse quand je continue « Une chose est sûre, je n’ai pas peur de toi et de ce qu’on pourrait faire à la fin de la soirée toi et moi. » Je veux le brusquer, lui montrer qu’il n’a pas totalement réussi à me cerner.

Peur de quoi ? A vrai dire j’ai ma petite idée sur la question. Une idée vague, parce que je ne suis pas dans sa tête, parce qu’elle n’est pas si simple que ça, parce qu’elle ne doit pas l’être. Je n’ai pas la prétention de dire que je l’ai cerné. La seule chose dont je suis sûre c’est qu’une fille comme elle, ne doit pas être facile à cerner. Mais je la ressens, je la ressens car quelque part, je lui ressemble. Ce n’est pas une certitude, c’est un instinct. C’est plus primitif, plus sauvage, plus originel. « De perdre le contrôle ? De t’abandonner et de vivre pour deux et non plus que pour toi. De prendre le risque d’avoir quelque chose à perdre ? ». En réalité, je parle peut-être de moi-même à cet instant. Et le trouble envahi déjà mon esprit, bien avant qu’elle n’ajoute cette fameuse phrase qui me fait rivé mon regard droit sur elle quand certains hommes impressionnables l’auraient fuis. Mes mouvements se font très lents, quand ils se font. Je ne bouge presque pas, je la fixe simplement. Elle et moi et les millions de choses que l’on pourrait faire à la fin de la soirée. Ça, ça ne l’impressionne pas, ça ne l’effraie pas. Et par-dessus tout, ça captive mon attention. « Tu devrais peut-être avoir peur … Mais je l’avoue pas pour les mêmes raisons ». Non là, il ne s’agit plus d’avoir quelque chose à perdre. Mais je ne suis pas forcément le garçon le plus recommandable, ni le plus fréquentable de la ville. Je veux qu’elle soit au clair sur ça. Car si elle l’est, je pourrais facilement me laisser tenter par ces choses que l’on pourrait faire à la fin de la soirée elle et moi.

Quand j’attends qu’il réponde à ma question, je me rends compte que j’ai peut-être peur d’une chose : de sa réponse. Qu’il puisse prétendre tout comprendre en ne m’ayant vu que quelques secondes. Je suis patiente en extérieur alors quand l’intérieur je bouillonne un peu d’impatience à l’idée de savoir ce qu’il a pu voir dans mes yeux. Et le verdict tombe, comme à la fin d’un procès. Je suis bonne à être condamnée.  « De perdre le contrôle ? De t’abandonner et de vivre pour deux et non plus que pour toi. De prendre le risque d’avoir quelque chose à perdre ? » J’ai l’impression d’en avoir perdue ma langue tant c’est tranchant de vérité. Alors ma peur serait donc celle-là ? Je n’en sais rien, je ne sais pas. Je voudrai trouver une parade, quelque chose, un nouveau masque qui pourrait prouver qu’il a tort sur toute la ligne. « Perdre le contrôle, je te l’accorde … Mais pour le reste. » Pour le reste je me braque, je soupire. Je ne veux pas vivre pour deux, ce n’est pas un peur mais bel et bien un choix de vie. Je vis pour moi, j’aime ça. La façon de me protéger est donc celle de la drague, de lui montrer, que je ne suis pas qu’une gamine qui a peur des choses qu’il vient de citer. Non, je lui montre que dans tous les cas, je n’ai pas peur de lui et je me fais déjà une idée sur comment je pourrai lui prouver. « Tu devrais peut-être avoir peur … Mais je l’avoue pas pour les mêmes raisons. » Intriguée je mords ma lèvres inférieure en le défiant du regard. Sa phrase me donne envie d’en savoir plus, fait naitre en moi mille et une questions. « Tu es donc un mauvais garçon ? » ma voix se fait doucereuse, pour l’agacer, pour qu’il me dise ses petits secrets. « J’ai un faible pour ce genre de gars. » J’avoue en murmurant cette fois, j’avoue une vérité, un peu fascinée. Contente aussi qu’on ne parle plus de moi, ou tout du moins d’une façon que ne me dérange pas. Mais le problème c’est que je ne peux pas m’en empêcher, je me dois de rajouter quelque chose sur cette peur qui maintenant hante mes pensées. « Je n’ai et n’aurai jamais rien à perdre. » Jamais, vraiment.

Peu importe la façon dont elle reçoit les mots que je viens de prononcer. Si habituellement, je mets plus de réflexion avant de parler, cette fois ci, mes pensées m’ont simplement échappées et ce d’une façon si naturelle qu’elle ne peut qu’être sincère. C’est sincèrement ce que je pense d’elle. Au premier regard, au premier instinct, au premier feeling. Peut-être que je me trompe, ce n’est que la description d’une sensation, d’un sentiment brut. D’ailleurs elle me confirme que perdre le contrôle lui fait peur, mais que c’est bien la seule vérité de ma phrase. Un sourire s’étire malgré moi sur mes lèvres et j’hoche la tête sans insister, sans ajouter quoi que ce soit. Si elle le dit. Je laisse le sujet dévier et étrangement revenir à moi. Les yeux rivés sur sa lèvre qui se glisse douloureusement sous sa dent avant qu’elle ne la relâche pour parler, pour dire des mots qui me plaisent autant qu’il me donne envie de pousser le vice. « Vraiment ? ». Revenant sur la table, j’y pose mes avant bras, de part et d’autre, envahissant l’espace comme je le fais parfois. « On pourrait se revoir, pour que je te montre ce côté de ma personnalité … ». En réalité, je crève d’envie de m’échapper de cette soirée avec elle, d’en improviser une autre dans un autre endroit, sans artifices, sans barrières, juste elle et moi. Mais j’ai déjà promis à une demoiselle de la rejoindre à la fin de la soirée et même si j’hésite encore intérieurement à lui poser un lapin, je n’ai qu’une parole. D’un rapide regard, je scrute l’aiguille qui ne cesse de courir sur l’horloge. « Il ne faut jamais dire jamais jeune fille ». Dis-je sur un ton condescendant, moralisateur, peut-être pour marquer la différence d’âge ? Pour la provoquer ?

Lorsque je lui avoue avoir un vrai penchant pour les mauvais garçons, il ramène son corps vers la table, y pose ses bras dessus et me défie clairement du regard en prononçant un « Vraiment ? » qui n’a rien d’innocent. Je hoche la tête lentement de bas en haut pour confirmer mes propres dires. Oui, vraiment. J’aime le danger, l’adrénaline et la tentation, c’est vrai, je ne mentirai pas sur le sujet. « On pourrait se revoir, pour que je te montre ce côté de ma personnalité … » L’idée qu’il m’enlève maintenant pour me la faire découvrir me plait, vraiment, mais peut être que me faire désirer ne serait pas une mauvaise chose, je ne sais pas. Alors pour couper court à toute hésitation, j’attrape un stylo dans mon sac à main, avant de notre sur une serviette mon numéro de téléphone. « Si un jour tu es prêt à me montrer ça, au moins tu sauras comment me trouver. » Je lui laisse le choix, ne l’oblige à rien, parce que même si j’aime contrôler, comme je viens de lui dire, je ne suis pas du genre à forcer la main. Puis finalement je l’informe sur le fait que je n’ai et n’aurai jamais rien à perdre. Que je suis sans attache, sans regret. Que personne n’a assez d’influence sur moi pour me faire changer et que, en résumé, ça me convient de vivre de cette manière, étant donné que c’est ce que j’ai toujours recherché. « Il ne faut jamais dire jamais jeune fille » Alors je me mets à rire franchement, je penche mon corps sur la table au moment où j’entends la sonnette retentir et nous signifier que c’est terminé, j’humidifie mes lèvres avant de prononcer les mots qui pour lui seront les derniers de ma part, ce soir. « J’ai hâte que tu me rappelles, histoire que je te prouve que je ne suis pas aussi jeune que ça. » On ne peut pas faire plus clair, je crois. J’ai l’intime conviction que nous nous reverrons Adam et moi, et je peux le dire sans avoir peur de rougir, je suis impatiente de vivre ce moment là.