Skylar King aime ce message
@Milo Sanzari
Au point où j'en suis dans ma vie, j'veux juste faire un gros doigt à mon passé. Pas si facile dans une ville qui m'a vu grandir et sombrer, les tentations sont putain de grandes et j'passe mon temps à essayer d'échapper à ce que j'ai toujours été. J'veux juste que ma fille n'ait pas dans l'regard l'image d'un père absent à cause de ses conneries ; même si c'est c'que je suis. J'peux me servir tous les bobards de la planète, j'ai pas été à la hauteur. J'ai été assez con pour faire confiance. Assez con pour m'croire intouchable sur mon trône de merde. Quand j'regarde ces tatouages, j'ai la haine contre le type que j'étais. La haine contre ce connard qui s'est laissé berner, contre ce connard qui a cru pouvoir toucher les étoiles sans s'faire redescendre violemment sur Terre. Alors j'ai économisé. Assez pour commencer à recouvrir les traces de c'passé, assez pour m'offrir un nouveau départ au-dessus des rangs et autres honneurs tatoués sur ma peau.
J'en ai fais plusieurs, des tatoueurs, avant d'avoir l'feeling avec cet italien. Va savoir pourquoi lui ; j'aime son taf, j'ai été à l'aise dans les quelques échanges qu'on a eu par téléphone pour parler du projet. Les autres, j'les sentais pas trop, il manquait un truc, une vibe, j'sais pas trop quoi exactement, mais ça le faisait pas. J'ai négocié ma journée pour ce rendez-vous, j'dois travailler pendant mon jour d'repos à la place mais très honnêtement, ça m'en touche une sans faire bouger l'autre, alors j'ai pas trop hésité à accepter le compromis. Et me voilà, une clope à la bouche, devant le shop. Je recrache ma fumée en matant la devanture ; l'ambiance me plaît, y'a un truc qui fait que je m'y retrouve dans ce qu'il a l'air de proposer. J'ai hâte, en vrai. Ça fait bien longtemps qu'j'ai pas senti l'aiguille d'un professionnel. Je garde quelques merdes de mon incarcération, faits dans des conditions à s'chier dessus, mais ça fait longtemps qu'c'est pas un vrai tatoueur qui m'a transpercé la peau. Peut-être que je les ferais recouvrir, ces merdes là aussi. Mais pour l'instant, c'est mon grade qui va disparaître sous les coups d'son dermo, en emportant avec eux une partie de l'homme que j'ai pu être.
Le mégot fini sous mon pied, je l'écrase distraitement avant de passer la porte du shop. L'odeur est caractéristique des salons de tatouages ; mélange d'encre, de sang et de désinfectant. Ça me collerait presque des frissons. J'ai toujours aimé ça, les tatouages. J'trouve l'acte reposant, presque spirituel, une sorte de communion entre soi et sa douleur. J'ai éprouvé chacune de mes pièces, même les plus complexes, avec un bonheur dont j'parle jamais. J'suis pas sûr que grand monde comprendrait mon rapport au tatoo, et honnêtement, j'ai juste la flemme d'expliquer. Quant à savoir si ce tatoueur deviendra le mien ou non, c'est encore un peu tôt, j'ai besoin d'voir comment il s'en sort avec moi. Prêt de l'accueil, j'attends qu'il arrive avec l'impatience de voir l'dessin qu'il me réserve. J'lui ai pas donné trop d'indications, juste des grandes lignes ; j'veux pas le brider dans sa créativité. J'voulais un truc qui mêle ma culture hawaïenne avec quelques détails de ma vie ; des défenses de sanglier, quelque chose qui rappelle la moto et les coordonnées gps de l'hôpital dans lequel est né ma fille. J'lui fais confiance pour faire un truc cohérent ; j'veux un truc qui en jette, un truc dont j'serai fier, que j'pourrais montrer sans la gêne et la honte de ce que j'ai pu faire par le passé. Un truc qui casse un peu les préjugés, aussi. M'proposer juste un tribal avec deux ou trois détails mal travaillés, ça l'fera pas.
Et puis je le vois arriver, alors j'm'avance vers l'accueil en lui tendant la main. « Salut, j'suis Bane. On a rendez-vous. » dis-je, en le détaillant malgré moi du regard. J'vais lui confier mon bras, faut bien que je puisse me faire une idée plus concrète de la personne qui va tenir l'aiguille.
Au point où j'en suis dans ma vie, j'veux juste faire un gros doigt à mon passé. Pas si facile dans une ville qui m'a vu grandir et sombrer, les tentations sont putain de grandes et j'passe mon temps à essayer d'échapper à ce que j'ai toujours été. J'veux juste que ma fille n'ait pas dans l'regard l'image d'un père absent à cause de ses conneries ; même si c'est c'que je suis. J'peux me servir tous les bobards de la planète, j'ai pas été à la hauteur. J'ai été assez con pour faire confiance. Assez con pour m'croire intouchable sur mon trône de merde. Quand j'regarde ces tatouages, j'ai la haine contre le type que j'étais. La haine contre ce connard qui s'est laissé berner, contre ce connard qui a cru pouvoir toucher les étoiles sans s'faire redescendre violemment sur Terre. Alors j'ai économisé. Assez pour commencer à recouvrir les traces de c'passé, assez pour m'offrir un nouveau départ au-dessus des rangs et autres honneurs tatoués sur ma peau.
J'en ai fais plusieurs, des tatoueurs, avant d'avoir l'feeling avec cet italien. Va savoir pourquoi lui ; j'aime son taf, j'ai été à l'aise dans les quelques échanges qu'on a eu par téléphone pour parler du projet. Les autres, j'les sentais pas trop, il manquait un truc, une vibe, j'sais pas trop quoi exactement, mais ça le faisait pas. J'ai négocié ma journée pour ce rendez-vous, j'dois travailler pendant mon jour d'repos à la place mais très honnêtement, ça m'en touche une sans faire bouger l'autre, alors j'ai pas trop hésité à accepter le compromis. Et me voilà, une clope à la bouche, devant le shop. Je recrache ma fumée en matant la devanture ; l'ambiance me plaît, y'a un truc qui fait que je m'y retrouve dans ce qu'il a l'air de proposer. J'ai hâte, en vrai. Ça fait bien longtemps qu'j'ai pas senti l'aiguille d'un professionnel. Je garde quelques merdes de mon incarcération, faits dans des conditions à s'chier dessus, mais ça fait longtemps qu'c'est pas un vrai tatoueur qui m'a transpercé la peau. Peut-être que je les ferais recouvrir, ces merdes là aussi. Mais pour l'instant, c'est mon grade qui va disparaître sous les coups d'son dermo, en emportant avec eux une partie de l'homme que j'ai pu être.
Le mégot fini sous mon pied, je l'écrase distraitement avant de passer la porte du shop. L'odeur est caractéristique des salons de tatouages ; mélange d'encre, de sang et de désinfectant. Ça me collerait presque des frissons. J'ai toujours aimé ça, les tatouages. J'trouve l'acte reposant, presque spirituel, une sorte de communion entre soi et sa douleur. J'ai éprouvé chacune de mes pièces, même les plus complexes, avec un bonheur dont j'parle jamais. J'suis pas sûr que grand monde comprendrait mon rapport au tatoo, et honnêtement, j'ai juste la flemme d'expliquer. Quant à savoir si ce tatoueur deviendra le mien ou non, c'est encore un peu tôt, j'ai besoin d'voir comment il s'en sort avec moi. Prêt de l'accueil, j'attends qu'il arrive avec l'impatience de voir l'dessin qu'il me réserve. J'lui ai pas donné trop d'indications, juste des grandes lignes ; j'veux pas le brider dans sa créativité. J'voulais un truc qui mêle ma culture hawaïenne avec quelques détails de ma vie ; des défenses de sanglier, quelque chose qui rappelle la moto et les coordonnées gps de l'hôpital dans lequel est né ma fille. J'lui fais confiance pour faire un truc cohérent ; j'veux un truc qui en jette, un truc dont j'serai fier, que j'pourrais montrer sans la gêne et la honte de ce que j'ai pu faire par le passé. Un truc qui casse un peu les préjugés, aussi. M'proposer juste un tribal avec deux ou trois détails mal travaillés, ça l'fera pas.
Et puis je le vois arriver, alors j'm'avance vers l'accueil en lui tendant la main. « Salut, j'suis Bane. On a rendez-vous. » dis-je, en le détaillant malgré moi du regard. J'vais lui confier mon bras, faut bien que je puisse me faire une idée plus concrète de la personne qui va tenir l'aiguille.